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L’usine d’art d’Andy Warhol

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Parfois, les lieux sont autant intéressants que les gens qui vivent dedans. Le lieu en question est un studio, situé au 5ème étage d’un immeuble de Manhattan. C’était assez calme, avant. On y fabriquait des chapeaux, de 8h du matin (des femmes y travaillent principalement, elles pointaient à 7h30) jusqu’à 18h. Ça roulait pas mal, mais très vite la révolution culturelle a frappé à la porte. Les années 60 commencent. Le studio est vendu quelques années plus tard, certaines pièces mécaniques restent en place. Le 28 janvier 64, le nouveau propriétaire des lieux s’appelle Andy Warhol.

Le maître des lieux veut produire du “mythe”.

Source : www.huffingtonpost.com
Source : www.huffingtonpost.com

Les murs changent immédiatement de couleur. Le nouveau patron demande que la décoration soit uniquement argentée. Du sol au plafond, en passant par les meubles, les poignées de portes, les machines, les téléphones et même les ascenseurs seront de la couleur de l’acier. De la couleur de l’industrie. Un nouveau souffle pour l’endroit qui pourtant, est encore loin d’imaginer ce qui l’attend.

Le maître des lieux veut produire du “mythe”. Il cherche ici à créer quelque chose autour de l’art en faisant de la Factory un endroit fascinant, au sens premier du terme. Warhol avait compris l’importance qu’il avait, et l’influence qu’il exerçait sur ses sujets. Il ne se gênait d’ailleurs pas de les faire travailler à la chaîne pour ses sérigraphies; chaque œuvre devait provenir de la main de l’homme. Donc jour et nuit, les junkies arrivistes, les artistes pleins d’espoir et les drag-queens amoureux se relayaient pour faire plaisir à Andy, en l’aidant dans sa quête artistique. Il décide de qui doit être célèbre, juste en pointant du doigt.

« Tu entres anonyme, tu sors en Superstar ma chérie !”

Fabrique d’images, oui mais quelles images ? Des images factices, peintes par de la main-d’œuvre désabusée ; ou l’image sociale que l’on façonne à grand coup de promotion ? Dans la Factory, c’est un peu les deux. Pour preuve, quand l’endroit ne fonctionne pas à plein régime il se transforme en rendez-vous de la jet-set : galerie d’exposition, studio de tournage, salle de projection, salle de concert, boîte de nuit. On imagine que la drogue tient une place privilégiée. Tout est bon pour faire venir du monde. L’art est relégué au rang de prétexte. On vient chez Warhol pour se mélanger aux artistes dépressifs, et faire la fête. Le reste, on s’en tape.

Mais il y a aussi quelques tragédies qui se jouent. Une des ses “courtisanes” avait décidé de réunir tous ses anciens amants, à la même heure, à la Factory. A l’heure fixée, tous sont en bas,  certainement en train de discuter. L’un d’entre eux se décide à faire sonner l’interphone, et la jeune femme se jette à travers les fenêtres du 5ème étage et vient mourir sur le trottoir, aux pieds de ceux qui furent pendant un temps, les hommes de sa vie.

Source : www.emmanuellepatry.fr
Source : www.emmanuellepatry.fr

In the future, everyone will be world-famous for 15 minutes.

Warhol lui-même se fera également tirer dessus à 3 reprises par Valérie Solana (une proche), qui l’accuse de plagiat et surtout de ne pas la prendre au sérieux. En gentleman, il refusera de porter plainte. Elle déclarera plus tard à la police : “Warhol avait trop de contrôle sur ma vie”. La blessure n’est pas seulement physique, puisque tout ce joli petit monde décide de prendre ses distances.  Et de repartir chacun dans sa direction. L’épais nuage d’illusions s’est dissipé, un coup de feu marque la fin de l’aventure.

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